28 mai 2012

Rameau, musicien d’avenir




Dans le blog du 6 mai, nous évoquions le renouveau de la musique baroque vers la modernité. Dans cette voie exigeante, le centre de chorégraphie de la compagnie Montalvo-Hervieu a su relever le défi pour mettre en scène une comédie-ballet de Jean-Philippe Rameau: « Les Paladins »

Cet opéra-ballet a été représenté pour la 1ère fois en 1760, trois ans avant la mort du musicien, devant un public parisien enthousiaste. Spectacle total, alliant avec subtilité le plan visuel et le plan musical sur un fond d’intrigues faciles à suivre, c’est un superbe enchaînement d’airs et de danses dans des rythmes contrastés.
                     Présenté en mai 2004 à Paris au théâtre du Châtelet,
« Les Paladins » ont également remporté un vif succès, tant la nostalgie de la musique de Rameau et l’étrange pouvoir de suggestion du chant et de la danse dans une atmosphère de féérie, sont inhérents au talent exceptionnel de Jean-Philippe Rameau.

Les paladins, personnages médiévaux du palais de Charlemagne, remis à l’honneur au XVIIIème siècle, évoquent le palais romain et une société policée, un thème à la mode à cette époque-là. L’intrigue est banale :
Un tuteur garde prisonnière sa pupille qu’il veut épouser mais celle-ci est éprise d’un jeune homme qui vient la délivrer avec un groupe de paladins déguisés en pélerins.

On ne peut qu’être sensible à la modernité du décor, la réussite de l’intégration entre chant et danse, l’harmonie entre la mise en scène et la chorégraphie. L’introduction de la vidéo qui renouvelle constamment le décor, sublime le merveilleux du spectacle.
En arrière-plan, apparaît l’image du château, parfois remplacé par un fond de ciel nuageux puis un jardin à la française où évoluent toutes sortes de personnages parfois métamorphosés en papillons, en animaux, en paons et vice-versa selon les aspirations des personnages, tout cela en symbiose avec des sentiments  de langueur ou de volupté s’accélérant parfois jusqu’à l’agressivité. Les costumes très modernes et de couleurs vives, parfois criardes, les lumières superbes rythment les déplacements des acteurs et des danseurs.
La chorégraphie est entraînante, la gestique des danseurs hip-hop et de rap,  faite de déhanchements, de mouvements syncopés, lascifs ou délirants s’accorde merveilleusement avec la musique tantôt langoureuse ou  endiablée dans l’espace scénique sous la direction éclairée de William Christie.

Rameau, « musicien d’avenir » selon Claude Debussy, c’est ce que nous ressentons après ce spectacle éblouissant ! La peinture de l’amour et des états d’âme des acteurs est exprimée avec une sensualité et une finesse surprenantes pour son époque, les sentiments sont magnifiés par le mélange des timbres instrumentaux, des jeux de l’harmonie avec la mélodie. La liberté d’expression de ce spectacle vivant laisse une place de choix à la modernité qui, tout en respectant le passé, ouvre ses droits aux goûts actuels.
M. S


  Pierre Sentenac - La danse


  
   Spectacle & DVD:

   Comédie-ballet en trois actes, créé le 10 février 1760 à l’Académie royale de musique de Paris
Musique de Jean-Philippe Rameau (1683-1764) _ Livret de Duplat de Monticourt

   Théâtre du Châtelet du 14 mai au 28 mai 2004 : Les Paladins de Rameau
   Les Arts Florissants, choeur Les Arts Florissants dirigé par William Christie
   Chef de choeur : François Bazola
   Centre Chorégraphique National de Créteil et du Val-de-Marne
Compagnie Montalvo-Hervieu,
   Lumières: Philippe Berthomé

   Atis: Topi Lehtipuu, Argie: Stéphanie D'oustrac, Nérine: Sandrine Piau 
   Orcan: Laurent Naouri , Manto: François Piolino, Anselme: René Schirrer
   Un Paladin: Emiliano Gonzalez-Toro

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